Ce ne sont pas moins de 1100 points lumineux, très majoritairement d’éclairage public, qui ont été mesurés par Athena-Lum en décembre 2019 sur 9 communes de l’agglomération grenobloise et consignés dans une base de données : mesures d’éclairement, de hauteur de mât, de spectre, de température de couleur et évaluation de la lumière non ciblée.

Fig. 1: captures d’écran du SIG de terrain : fond satellite Google, fond OSM et menu de saisie.

Ce travail a été réalisé dans le cadre d’une fiche action du Contrat Vert et Bleu de Grenoble Alpes Métropole intitulée « La trame noire : composante d’une TVB fonctionnelle ». Le Contrat Vert et Bleu est un outil dont l’objectif est la préservation ou la restauration des continuités écologiques contraints par l’urbanisation et les aménagements. Ces continuités écologiques forment des trames dont les principales sont la trame verte (milieux naturels agricoles et forestiers) et la trame bleue (milieux humides et aquatiques). Ce travail, porté par FNE Isère, part du constat que la fonctionnalité des trames vertes et bleue peut être mise à mal par l’éclairage artificiel nocturne du fait de la sensibilité du vivant à la lumière. Le concept de pollution lumineuse et de trame noire, pour qualifier des continuités protégés de la lumière, a ainsi vu le jour.

Athena-Lum a évalué la pollution lumineuse émise sur les 4 corridors prioritaires de la métropole de manière quantitative (quantité de lumière émise par la source ; direction de la lumière ; temporalité de la lumière) et qualitative (composition spectrale de la lumière). Cette évaluation est basée sur des critères mesurables pour permettre d’évaluer l’impact sur les espèces vivantes et de proposer des pistes d’amélioration pour les collectivités.

Fig. 2 : localisation des points lumineux sur le corridor n°1

Les données spectrales ont été analysées avec des outils issus de plusieurs équipes de recherche dans le monde. Différents indices ont été utilisés qui ont permis de classer les différentes sources lumineuses en fonction de leurs impacts biologiques et écologiques connus.

Les différents indicateurs concordent sur le fait que les sources à température de couleur chaude (≤ 2000K) sont globalement les moins perturbantes pour le vivant. Il s’agit soit des lampes au sodium haute pression, soit des LED ambres. Ce constat est en contradiction avec les pratiques actuelles de rénovation dont la tendance est aux LED blanches de 3000K.

Fig. 3 : classement des sources en fonction de l’un des indices utilisé (ici indice de suppression de la mélatonine)

Les 4 corridors prioritaires présentent tous un éclairage conséquent. 5 communes sur les 9 concernées par l’étude pratiquent l’extinction en milieu de nuit, ce qui est supérieur à la moyenne nationale de 38 %. Sur certains secteurs il reste des continuités sombres à préserver. Actuellement les sources majoritaires restent les lampes au sodium (68%) mais toutes les rénovations récentes se font en LED 3000K, ce qui est inquiétant pour la fonctionnalité écologique.

L’étude aborde rapidement (pour des questions de manque de données) la question énergétique. Les LEDs bénéficient d’une image d’éclairage « vert » peu gourmand en énergie. Les quelques exemples donnés montrent que le sodium haute pression est tout à fait compétitif avec les LEDs du point de vue énergétique avec un bénéfice important en terme de faible perturbation écologique. Les lampes qu’il convient effectivement de remplacer sont les vapeurs de mercure haute pression (BF) qui éclairent peu et consomment beaucoup ; elles peuvent être remplacées à moindre coût par des sodium haute pression, notamment en présence d’enjeux écologiques.

Fig. 4 : puissance installée et éclairement en pied de mât (normé à 5 m) de quelques luminaires :
LED-a : ch. des Mûres Noyarey
LED-b : route dep. Noyarey
LED-c : échangeur A51 Varces
LED-d : parking le long de la route dep. Noyarey
LED-e = ZAC Champagnier
SHP-a : SHP lanternes de style Noyarey
SHP-b : échangeur A51 Varces
BF : : Lotissement Noyarey

En conclusion

Ce travail montre l’intérêt d’une approche de la pollution lumineuse au plus proche du terrain, c’est à dire au plus proche du lieu d’interaction entre l’éclairage et les espèces. L’analyse spectrale des sources s’avère être un outil pertinent pour comparer les sources entre elles. Cela apporte un élément d’information supplémentaire pour les choix d’installation en cas de renouvellement de l’éclairage.
Ces éléments doivent permettre d’établir un zonage différencié de l’éclairage d’une commune en privilégiant les éclairages les moins perturbants pour le vivant dans les lieux à enjeux biodiversité. C’est également l’occasion d’associer les habitants aux décisions qui concernent directement les ambiances nocturnes de leur lieu de vie.